Tech & Business
3.23.2020
Wakaful, quand la fintech s’inspire de la finance islamique

Quand les principes de la finance islamique se marient à la technologie blockchain, cela donne Wakaful: une start-up qui vient en aide aux malais qui n’ont pas accès à l’assurance et aux services financiers classiques.
Après un doctorat en finance islamique obtenu à l’Université Islamique de Kuala Lumpur, Hamma Radwan a travaillé quelques temps pour une plateforme de crowdfunding, puis pour The Blockchain Embassy of Asia. Un parcours qui le met rapidement sur la voie de la fintech et de l’inclusion. Aujourd’hui avec Wakaful, il réinvente la finance islamique avec la technologie blockchain. La jeune pousse a d’ailleurs participé à un accélérateur organisé par le fond de développement des Nations Unies et la banque centrale de Malaysie et terminé finaliste de #myfintechweek en Zambie.
Comment vous est venue l’idée de combiner finance islamique et technologie ?
En finance islamique, le Waqf est un don généralement dédié à une mission caritative, qui peut être fait par n’importe qui. Aujourd’hui en Malaisie, c’est l’état qui centralise son administration, ce qui signifie que si un donateur décide de donner des milliers de dollars à une cause spécifique, il ne peut l’appliquer au marché sans que l’État le fasse en son nom. Cela soulève la question de la transparence. C’est un problème qui entrave le waqf depuis l’empire ottoman, mais avant cela, lors sa mise en place à l’époque du prophète, c’était un système beaucoup plus décentralisé et chacun était libre de distribuer son argent comme il l’entendait. Au début de Wakaful, nous voulions vraiment bousculer l’industrie du waqf en apportant plus de transparence avec notre plateforme blockchain. Mais en faisant cela, nous avons vite réalisé que nous ne pourrions pas obtenir d’autorisations de l’État, et nous avons donc décidé de créer un fond “normal” à la place.
Quels types de services Wakaful fournit aujourd’hui ?
En Malaisie, un rapport de la banque centrale sur l’inclusion à l’assurance mentionne qu’environ 7,8 millions de Malaisiens en âge de travailler ne sont pas du tout assurés. Et la moitié d’entre eux se trouvent tout en bas de la pyramide économique, gagnant moins de 3000 ringgits (700 dollars) par mois. Nous avons essayé de nous demander comment créer plus d’inclusion avec un modèle capable de donner à ces personnes l’accès à l’assurance de base. Nous avons réalisé que l’éducation financière est le plus gros frein à l’adoption d’une assurance en Malaisie. Même si la banque centrale pousse les assurances à créer des produits moins chers, le manque d’éducation et de confiance des nécessiteux envers ces grandes entreprises les en empêche. Ils ne comprennent pas vraiment le fonctionnement et la valeur de l’assurance. Nous avons donc décidé de canaliser certains fonds de charité pour parrainer ces personnes à l’assurance pendant un certain temps. Nous sommes allés voir les entreprises pour leur demander comment elles menaient leur politique RSE, et elles nous ont dit qu’il y avait beaucoup de fonds de charité ( des dons allant jusqu’à des centaines de milliards de dollars) mais aucun moyen de savoir où l’argent était envoyé. Nous avons créé notre plateforme pour résoudre ce problème, en rendant l’allocation de ces fonds plus transparente et en leur disant où leur argent est dépensé, quel est leur impact et combien de vies sont sauvées. Nous comblons également une lacune de la loi malaisienne concernant la question des réfugiés. Comme ces derniers n’ont généralement pas de papiers d’identité, ils ne peuvent pas souscrire à une assurance, mais avec le système de parrainage, ils peuvent désormais obtenir une assurance grâce à leurs parrains. D’une part, nous apportons plus de transparence aux fonds caritatifs, d’autre part, nous rendons les produits d’assurance plus inclusifs.
Comment se porte le marché de la fintech en finance islamique aujourd’hui ?
Il y a deux choses. La première, c’est le marché de la finance islamique qui représente plus de 3 000 milliards de dollars. Un petit marché par rapport au système bancaire occidental, mais suffisamment mature en termes de valeur des actifs. Cependant, une grande partie de la population du monde musulman n’a toujours pas accès aux services bancaires. C’est là que la fintech islamique intervient. Mais ce marché est encore prématuré. Il y a tant d’innovations qui peuvent encore être faites en appliquant les principes de la finance islamique aux applications fintech.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Nous avons également lancé un deuxième produit appelé Credent capital. La Malaisie a récemment délivré une licence autorisant les échanges de crypto-monnaies, ce qui signifie qu’il s’agit désormais d’une activité entièrement réglementée. Toutes ces plateformes doivent faire appel à un tiers lorsqu’elles collectent des fonds pour des entreprises. Nous utilisons donc notre technologie pour trouver ce service Xero pour les échanges de devises afin qu’ils puissent commencer à fonctionner. Nous n’avons pas encore de licence, mais nous cherchons à collecter des fonds pour l’obtention de cette licence, afin de pouvoir commencer à fonctionner. Nous avons déjà des partenaires comme les assurances en Malaisie, l’institution Zakat mais aussi des ONG comme le projet Rohingya et Skolafund.